Le buzz de sa déclaration de renoncement à un 3ème mandat a fait long feu. Quelques heures ont suffi pour redescendre sur terre et constater qu’en fait Alassane Ouattara n’ira nulle part. Et il y a de quoi craindre. Car en poussant le pion Gon, il faut plutôt comprendre qu’ADO est candidat pour un (2è +1) mandat en Côte d’Ivoire. Or il s’agit de « cet homme qui n’a jamais perdu de combat.»
C’est bien malheureux. Mais pour pouvoir siéger au palais présidentiel d’Abidjan-Plateau, il faut prendre son ticket à l’Elysée. Et rien de nouveau sous les tropiques. L’ardent espoir Macron des premières heures, s’est tout de suite amenuisé à la pratique.
Est-ce possible qu’Emmanuel Macron puisse utiliser l’argent du contribuable français pour se rendre en Côte d’Ivoire et venir coprésider une simple cérémonie de pose de première pierre d’un marché à Bouaké ? Peut-être. Mais difficile à accepter quand on sait que ces pays-là tout est règlementé.
Le patron de l’Elysée a effectué ce déplacement pour sans doute harponner des ‘’garanties solides’’. Au-delà des contrats passés en direct à la Télévision nationale entre l’État de Côte d’Ivoire et celui de la France, il pourrait y avoir des non-écrits du reste plus consistants. En contrepartie, feu vert a été donné au régime d’Abidjan de consolider davantage son pouvoir.
Alors pour son schéma tactique, Ouattara décide de jouer la carte de l’élégance en ‘’renonçant’’ à briguer un 3ème mandat. En transférant « le pouvoir à la nouvelle génération » incarnée selon lui par Amadou Gon Coulibaly (AGC). Objectif ‘’entrer dans l’histoire’’, mais aussi et surtout livrer à la vindicte ses rivaux Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo. Si bien sûr ces derniers parvenaient à se défaire respectivement de leurs ennuis politiques (Ndlr : la candidature de Bédié n’est pas forcément la bienvenue au sein du PDCI) et judiciaires, décidaient de candidater pour 2020.
Sauf que le cheval RHDP sur lequel mise Ouattara est non seulement esseulé mais n’a visiblement pas la vaillance recommandée pour le sprint final d’octobre 2020.
En fait pour que l’exécutif français puisse accorder ses grâces à un pion – chose qui donnerait du coffre à ses justifs (Elysée)-il faudrait que la personnalité politique (généralement en Afrique francophone) en question ait tout de même une certaine assise politico-ethnique voire religieuse ou militaire. Henri-Konan Bédié et Laurent Gbagbo ainsi que Feu Robert Guei, en ont partiellement bénéficié.
Alassane Ouattara, lui, en jouit à jets saccadés depuis plusieurs décennies. Depuis que celui-ci, avec l’aide des médias occidentaux, a réussi à injecter dans le corpus sociopolitique ivoirien cette formule inflammable : « On ne veut pas que je sois candidat parce que je viens du Nord ! »
Malgré tout, en 2010, il a fallu aux côtés « du grand Alassane Ouattara », un certain poids lourd appelé Bédié (Electorat Baoulé), les renforts Mabri (Yacouba-Ouest) et Gnamien Konan et Anaky Kobenan, Patrick Achi… et surtout en cet arbitre-partisan nommé Guillaume Soro, etc. pour « battre » le candidat Laurent Gbagbo dans les urnes. Encore que le verbe « battre » demeure à ce jour difficilement conjugable.
Or le nouveau champion du RHDP selon la seule volonté de Ouattara, a contre lui des Laurent Gbagbo et Konan Bédié candidats ou parrains, Guillaume Soro désormais compétiteur et évoluant chez l’adversaire. En plus de Mabri, Gnamien Konan et Anaky Kobenan tous prêts à en découdre avec le RHDP et tout ce qui découle.
Pis le ‘’bastion électoral’’ sur lequel pourrait s’appuyer AGC est malheureusement considérablement fragmenté à l’heure actuelle. Le Nord est en effet divisé entre 2 grosses portions à savoir les Pro-ADO/AGC et les Pro-Soro ; (les Ivoiriens doivent savoir que Soro est plus en palabre avec Gon qu’avec Ouattara.) Ensuite avec le divorce ADO-HKB, cette partie septentrionale du pays est désormais occupée par des pdcéistes. Sans compter ce beau monde de frontistes qui y sont galvanisés plus que jamais. Grâce au travail de fourmi abattu par Koua Justin et d’autres cadres du FPI. Les foules, les militants et les électeurs sont trois (3) choses bien distinctes. Et la classe politique le sait mieux que quiconque. Il n’est pas évident qu’AGC mobilise comme c’était le cas à l’époque idyllique. Là où ADO, HKB et GS parlaient d’une même voix.
En gros, en sortant des discours trompeurs, il est fort aisé d’envisager un échec cuisant du candidat du RHDP sur cette base. Et le hic est que l’ordonnateur Alassane Ouattara bien que conscient de ces réalités, s’obstine à imposer Gon Coulibaly. Chose qui ne serait d’ailleurs pas du goût du non moins costauds Hamed Bakayoko. La récente marche des femmes réclamant la candidature d’ADO dans la commune d’Abobo serait symptomatique dudit malaise.
Sauf que l’actuel Chef d’Etat en a cure. Il affirme déjà que le RHDP remportera la présidentielle au 1er tour et que c’est désormais au score qu’il faudra réfléchir. Semblait-il dire lors du Conseil Politique de son parti le 13 mars dernier. Mathématiquement, politiquement, historiquement, au regard du contexte actuel, sauf miracle, une victoire du candidat AGC est très difficilement envisageable.
Alors sur quoi compte ADO ? Devrait-on redouter le remake de 2010 ? Surtout que le Sg du gouvernement ivoirien, Patrick Achi, semblait nous avertir à travers son discours (Conseil Politique du RHDP) en nous informant qu’Alassane Ouattara est ce grand homme qui rentre dans le bureau ovale (Maison Blanche) quand il veut ? « Ce Président africain que ses homologues d’Asie, d’Amériques et d’Europe consultent chaque fois que ceux-ci devraient prendre une décision » ? « Celui qui lorsqu’il parraine un candidat, celui-ci ne perd jamais ? »
Marius Aka Fils