En usant du langage footballistique, loin de nous l’idée de banaliser les maux générés par la crise au sein du parti de Laurent Gbagbo. En effet seul le sport, principalement le football réussi à rassembler au moins pour 90 minutes, la classe politique ivoirienne. Parcourons ensemble ce »Grand Format » sur la ‘’sagrado remontada d’Affi’’.
Gloire, disgrâce, rédemption et titularisation : 4 temps forts des 34 ans d’Affi passés au FPI
« En rencontrant Affi, Gbagbo a entrainé tout le Front Populaire Ivoirien (FPI).» Ces mots de Simone Gbagbo ont force de commandement au FPI. 9 petits mots qui viennent biffer quasiment 9 ans de crise interne. Car les bombes infligées à sa résidence, puis son transfèrement à la CPI, ont aussi fissuré le parti de Laurent Gbagbo. Aujourd’hui l’esprit de division semble avoir quitté la cour des ‘’Camarades’’. L’ambiance actuelle rappelle exactement la parabole du fils prodigue.Palette d’une carrière controversée.
2000-2010 : années de gloire, un Affi supersonique
Pascal Affi N’Guessan (PAN) n’était pas à Dabou lorsque les Gbagbo (couple), Drs. Dago Kokora et Boga Doudou Emile, Aboudramane Sangaré, créaient le FPI au printemps 1882. Le natif de Bouadikro (Bongouanou) rejoindra l’équipe au maillot bleu et rose en 1986. À la faveur d’une opération de détection nationale. Brillant ingénieur des télécom, d’ethnie Agni du Moronou (peuple historiquement favorable à l’opposant d’Houphouët-Boigny), ses statistiques parlaient pour lui. Stratégiquement, il fallait coopter un Akan, après le recrutement du Malinké Mamadou Koulibaly, capitaine adjoint du parti dirigé par un Krou. PAN est donc directeur de cabinet de Laurent Gbagbo président du Fpi, directeur de sa campagne en 2000 puis tout 1er Premier Ministre de la Refondation enfin président du FPI. L’actuel président du Conseil Régional du Moronou est jusque-là l’objet d’une ascension parmi les plus folles que l’échiquier politique ait offerte.
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2011-2013 : comme celui du Camp Nou, Affi le ‘’Messi’’ symbole d’espoirs des Bleu et rose*
le FPI sombre au terme d’une confrontation à polémiques. Le contentieux engagé n’est pas vidé tandis que Gbagbo est maintenu hors des stades. La charnière défensive de sa formation désarticulée, le milieu pris en sandwich entre avertissements et expulsions, l’attaque ne trouvant pas la faille est obligée de replier. Affi, capitaine en second, écope d’une suspension et est renvoyé dans un vestiaire peu salubre de la ville de Bouna. Les plus chanceux de l’équipe se réorganisent et saisissent les instances internationales. Les tractations conduisent à la réhabilitation dudit capitaine intérimaire le 05 août 2013. Dès lors les cadres du club adaptent leur tactique à l’effectif du bord. L’infirmerie étant pleine, plusieurs titulaires absents, ils élaborent un système gravitant autour d’Affi, le Messi. Hélas son ton monocorde, difficilement cernable Affi, ils ont du mal à comprendre le jeu de leur star. Les résultats attendus tardent à suivre. Pour certains décideurs le leader de l’équipe semble sortir du plan établi. L’ambiance n’est plus bon enfant.
2013-2019 : bruits de vestiaires et Affi perd le brassard de capitaine intérimaire
Les bouleversements aidant, il fallait donc miser sur d’autres leviers. Notamment remettre Gbagbo au cœur de la tactique. Histoire d’accroitre ses chances de retour sur le rectangle vert.
De son côté le frontiste en chef s’obstine. Pour lui il faut continuer à jouer malgré le fait que leur leader emblématique soit « arbitrairement » sanctionné. Ses sorties médiatiques portent à faire oublier le vrai patron du jeu : «…Pourquoi pleurer sur le cadavre… ?» La polémique enfle et bonjour les dégâts. Le capitanat est contesté. Désormais le brassard est porté par deux joueurs de la même équipe au cours d’un même match. Affi d’un côté, Aboudramane Sangaré de l’autre. Les aficionados suivent le mouvement. Les Camarades sont divisés en 2 groupes. Les ‘’Affidés’’ et les « Gbagbo Ou Rien » (Gor).
L’équipe scindée en 2 factions. Affi pèse de tout son poids pour la titularisation à la défense centrale d’un certain Jean Bonin. Talentueux mais très virulents envers ses vrais-faux adversaires. De l’autre côté, les invectives ne manquent pas non plus. Dans la foulée, celui qui se considère porteur légal du diadème va même provoquer un auto-goal. Suite à une plainte déposée contre Laurent Gbagbo, la commission des arbitres siégeant en face de la Cathédrale St Paul d’Abidjan-Plateau, invalide la ‘’licence’’ de celui-ci (primaires du FPI) le 29 décembre 2014. Le 3 avril 2015 Affi est confirmé capitaine de l’équipe par la même commission arbitrale. La déchirure s’approfondie davantage. Plus qu’un adversaire, PAN est l’ennemi juré, le « traitre », « la taupe » et l’ambiance devient invivable. Le retour de Gbagbo épouse et le décès du capitaine ‘’Gorien’’ Aboudramane Sangaré ne changeront rien.
Affi, leader contesté, « vainqueur sans gloire », « le capi sans légitimité » essuie les humiliations
L’avantage pris sur la bataille judiciaire devait s’avérer suffisant pour diriger le bateau avec sérénité. Quoiqu’en peu de temps Affi passe de l’extase au cauchemar. Le système de jeu est saboté par des partenaires mécontents. Le milieu de terrain cassé, Affi le feu follet, soulier d’or dans un passé récent, ne reçoit plus de balles en attaque. L’enjeu a changé entre temps. Et ça dépeint sur le jeu devenu davantage complexe. Sans doute n’imaginait-il pas que cela serait si difficile.
Aboudramane ayant fait ses adieux à la team, il est remplacé par Dr. Assoa Adou. Le coaching est signé Laurent Gbagbo lui-même. Fort de ses prérogatives de capitaine-entraineur. Dorénavant il fallait compter avec les adversités de son propre camp. De leur côté, la défense « dissidente » subit les assauts de l’équipe adverse. Celle-ci profite de ce moment de flottement pour se créer le maximum d’occasion et creuser l’écart. Déboussolé, le capitaine contesté profite d’une trêve pour se rapprocher du coach-capi qui s’est retrouvé entre-temps au pays d’Eden Hasard. La saignée s’accentue puisque en mars 2019, l’on apprend qu’Affi est carrément éconduit. Dans la même période, ce dernier subit de grosses pertes : Amani N’Guessan, Agnès Monnet et d’autres cadres « Affidés » rejoignent les Gor. Il prenait ainsi un nouveau coup de massue sur la tête.
2 passes magistrales de Gbagbo et Affi accrédité d’une sacrée remontada
Le FPI obtient tout de même son ticket pour les demi-finales malgré des mauvaises performances en poule. Si les pronostics venaient à se confirmer, le carré final mettra aux prises les formations : RHDP, PDCI, FPI avec soit LIDER ou RACI. Le football n’étant pas une science exacte, il n’est pas exclu que l’UDPCI et d’autres outsiders créent la surprise pour se retrouver à la grande finale prévue le 31 octobre prochain.
A ce stade de la compétition, il convient de mettre toutes les chances de son côté. D’autant que l’arbitre central désigné pour la finale est un transfuge reconverti du RHDP. Mais Kuibiert-Coulibaly arbore désormais le maillot noir. Peut-être que l’on devrait croire à son serment. Gbagbo et ses poulains conviennent à l’avenir d’aller à l’essentiel après 7 ans de palabres inutiles. Le chouchou du début des années 2000 bénéficie de la miséricorde de l’icône du club. Une première passe lui est faite le 3 janvier dernier puis une seconde le lendemain. Les observateurs retrouvent le Pascal des grands jours. Le meneur de jeu intenable. Oint par le grand chef, il jouit de facto d’une sympathie renouvelée. Le FPI retrouve son jeu. Les passes précises, une défense hermétique, des attaquants inspirés et réalistes et les victoires s’enchainent. En plus de retrouver le brassard, il est fait porte-parole des Bleu et Rose. A preuve c’est à lui que sont confiées les négociations pour la réintégration du « Patron » Laurent Gbagbo. Mieux, l’on appelle à former l’union sacrée autour d’Affi. Sacré remontada !
Marius Aka Fils